Orthophonie
Par Lauriane Venin-Consol, orthophoniste accompagnant de nombreux enfants avec autisme

Les enfants autistes sont souvent épileptiques, à l’inverse les enfants atteints de FIRES développent parfois des comportements de type autistique. Quels sont les outils que vous utilisez avec les enfants autistes qu’il pourrait être intéressant d’essayer avec les enfants atteints de FIRES?
Je parlerai donc ici de ma pratique auprès des enfants avec autisme. Les patients avec d’autres troubles n’auront pas les mêmes besoins. Je ne livre ici que quelques pistes, car il y a autant de projet de soin que d’enfants, et une diversité de méthodes.
Concernant les comportements « défis », structurer le temps et l’espace est le maître mot dans l’accompagnement des enfants avec autisme. Il s’agit de permettre à l’enfant de planifier, d’anticiper, de structurer son environnement.
On utilise souvent des schémas visuels verticaux présentant la succession des activités de la journée. Ce peut être la photo des différents lieux fréquentés, la photo d’une personne. Quand l’enfant a un niveau d’abstraction adéquat, la planification peut être faite avec des pictogrammes, ou des phrases. Souvent, on propose de scratcher les photos, et quand l’activité est terminée, on ôte les photos concernées.
En séance d’orthophonie, je structure ma séance avec des bannettes numérotées. L’enfant peut donc voir à l’avance les activités à venir. J’utilise ausside gros sabliers pour indiquer la durée d’une activité ( de 30 secondes à 15 minutes). Cela diminue considérablement ce qu’on qualifie à tort de « trouble du comportement ».
En ce qui concerne les enfants qui ont peu ou pas de langage verbal, j’utilise les signes du programme Makaton et des pictogrammes. Le principe de cette méthode est de signer les mots clés de la phrase à mesure qu’on les articule.
Cela permet à l’enfant de visualiser les mots, qui sans ça, sont amalgamés parmi tous les autres ( phénomène de co articulation du langage). Cela induit naturellement aussi le locuteur à ralentir son débit de parole. Cette méthode est alors soit augmentative (va permettre l’émergence du langage) soit palliative (dans le cas ou l’enfant s’approprierait les gestes sans les associer à la parole). En outre, dans la plupart des cas, les signes viennent soutenir la compréhension du message verbal.
Pour d’autres enfants, ce sera le PECS qui sera plus adapté. Le principe est de communiquer par échange d’images (photos, images, pictogrammes). Parfois, l’enfant aura plutôt accès à une communication par échange d’objets ( plus concret). La motivation de l’enfant est aussi une des clés de nos « petites victoires » rééducatives, gagnées au fil des séances. J’utilise de nombreux « renforçateurs » propres à l’enfant, qui n’a pas forcément le même système de valeurs que nous.
Par exemple, je peux mettre dans la troisième bannette d’un enfant un objet convoité ( un objet sensoriel, un jeu du bureau repéré par l’enfant, des bulles, un bonbon si l’enfant n’est sensible pour un temps qu’aux motivations alimentaires, l’Ipad…). L’enfant sait pourquoi il travaille et est plus enclin à accepter les activités proposées.
Il faut enfin souligner l’existence de technologies de plus en plus adaptées pour les enfants qui ne peuvent pas s’exprimer oralement: synthétiseurs vocaux, tableaux de communication électroniques, tablettes numériques… Il existe par exemple des tableaux de communication intéressants, pas forcément onéreux sur IPad, avec l’avantage d’être léger et facilement transportable.
Le rôle de l’orthophoniste est donc de choisir dans sa « boîte à outils », et en accord avec la famille, quelle technique conviendra le mieux à l’enfant. Il faut d’ailleurs souvent réajuster, réenvisager les méthodes, imaginer du sur-mesure, car les enfants sont tous uniques et plein de surprises!
Y a-t-il des orthophonistes « spécialisés » dans ce type de troubles, comment les parents peuvent-ils les trouver?
Le Certificat de Capacité d’Orthophoniste (devenu cette année (2012) un Master 2 d’orthophonie) ouvre le champ de rééducations et prise en charge diverses et variées (Cf nomenclature générale des actes http://www.ameli.fr/fileadmin/user_upload/documents/NGAP_14_02_2013.pdf page 68). L’orthophonie se veut généraliste. Toutefois, et surtout en ville, certaines orthophonistes font le choix de centrer leurs formations dans un domaine en particulier et de fait, reçoivent plus de patients souffrant de cette pathologie.
Certains orthophonistes sont formés à des méthodes spécifiques non enseignées en formation initiale (Makaton, PECS , Padovan, DNP, ABA, Gestion Mentale, Logico-mathématique, Ostéovox…) et certains organismes de formation recensent les personnes formées à leur méthode.
Pour les parents, le plus simple est de faire appel à l’orthophoniste de leur quartier qui fera appel à son réseau pour conseiller une orthophoniste formée à telle ou telle méthode. Pour information, les orthophonistes forment le corps de métier du champ médical et paramédical qui se forme le plus.