Les chiens d’assistance pour personnes épileptiques
Le 27 septembre 2018
Entretien avec Ulrick Deniau, éducateur canin et référent Épilepsie pour HandiChiens.

Paratonnerre s’intéresse aux chiens d’alerte depuis sa création, deux de nos membres avaient suivi une formation il y a quelques années avec l’association Hachiko en Belgique (voir article ci-dessous). Handichiens était présent. Où en êtes-vous aujourd’hui ?
J’étais présent chez Hachiko pour HandiChiens. Depuis nous avons continué à nous former. Nous nous sommes formés avec Jennyfer Cattet qui élève des chiens d’alerte aux États-Unis. Elle se base sur l’olfaction.
Il semblerait qu’avant et pendant une crise, une personne épileptique dégage certaines molécules odorifères. Certaines études scientifiques auxquelles nous participons – certains chiens de particuliers détectent les crises – sont en cours. En tout cas, Jennyfer Cattet indique un taux réussite de 70%. 70% des chiens formés à l’épilepsie sont capables de détecter une crise avant qu’elle n’arrive. La réussite n’est pas absolue mais d’autres biais peuvent intervenir : attachement du maitre et du chien, types de crises. Par exemple, elle a essayé de former des chiens pour détecter les crises-absences mais ça n’a pas été concluant. Peut-être trop peu de dégagement de molécules…
Et pour alerter après, quand la crise est passée ?
Par contre, 100% des chiens formés sont capable d’intervenir pendant la crise. Selon la personne le chien est formé à aboyer, se coucher sur sa poitrine, apporter des médicaments…La difficulté c’est qu’il n’y a pas de commande de la part du maitre. La commande, c’est la chute ou la convulsion.
Mais justement, comment le chien est-il formé à reconnaitre les crises ? Quelle fréquence de crise permet cette reconnaissance ?
Nous avons repris les critères de Jennyfer Cattet. Elle fixe la fréquence raisonnable pour permettre à un chien de devenir un chien d’alerte à une crise par mois. Hachiko disait encore plus. En tout cas, trois crises par an c’est insuffisant pour que le chien puisse les reconnaître.
Quels sont les autres critères ?
Pour l’instant, on forme les adultes et les adolescents qui ont la capacité de gérer les chiens. Mais dans le futur, en accumulant des expériences, on souhaite ouvrir cette offre aux personnes qui ont des troubles associés (c’est à dire pas ou pas toujours en mesure de gérer leur chien).
L’autre frein que nous rencontrons et celui des personnes seules. Il faut un certain temps pour que le chien deviennent performant et bien souvent, il n’aura pas vu de réelle convulsion pendant sa formation. Donc, lors des premières crises, il est souhaitable qu’une personne fasse « la médiation » rassure le chien qui est susceptible de paniquer, car là, il est en présence d’une « vraie » crise. En général, elles sont simulées pendant la formation.
Comment cela se passe-t-il pour avoir un chien d’alerte ?
Nous sommes 4 éducateurs canins formés pour l’instant à l’épilepsie en France. Nous avons remis nos premiers chiens en février et quatre nouveaux sont à venir en novembre.
Je suis devenu le référent pour l’épilepsie. C’est à moi qu’il faut adresser les demandes. Une fois le dossier complété, il y a un temps d’attente pour le traiter. Les demandes passent en commission d’admission. J’évalue l’environnement et la situation pour le chien. C’est un neurologue, le Dr Jean-Luc Schaff qui va juge des besoins des personnes en fonction de leurs pathologies.
Une fois le dossier retenu, on reçoit la personnes en entretien pour déterminer ses besoins, pour la connaitre. Et en fonction de ça, on va choisir un chien qu’on pense avoir la capacité à devenir son chien d’assistance. Ce n’est pas une question de race, mais de caractère. On voit ensuite si le « feeling » passe entre la personne et le chien.
Vient alors la formation du chien avec notamment la formation olfactive. On va demander aux proches de la personne de prélever des échantillons de sueur pendant les crises.
Il peut y avoir un an et demi entre la demande et la remise du chien et ça va forcément augmenter avec la demande. Cela peut-être beaucoup plus long. Je pense aux chiens d’éveil pour les enfants polyhandicapés par exemple où on a 2 ou 3 ans d’attente.
Comment la MDPH prend en charge la formation? Quel est le reste à charge pour les personnes épileptiques?
Au niveau de la MDPH, il y a une aide animalière qui peut être demandée. Ensuite tous nos chiens sont remis gratuitement aux futurs bénéficiaires.
Quels retours avez-vous concernant vos premiers chiens formés ?
Et bien, il faut plusieurs mois pour qu’un chien soit performant. Nous sommes encore dans une période transitoire mais les premiers retours sont bons. Au moins deux chiens sur les trois ont déjà réussi à alerter certaines crises et ils sont tous capables d’intervenir pendant la crise.
Après la formation dispensée par l’association Hachiko.
6 & 7 octobre 2015
Notes de formation dispensée par Caroline Thienpon – HACHIKO
L’association Hachiko forme des chiens d’aide depuis 1994. En 13 ans, elle a fourni 11
chiens pour épileptiques.
Il est préférable de supprimer les crises d’épilepsie plutôt que de faire appel aux services
d’un chien d’aide.
Caroline T. souligne bien l’importance de trouver en premier lieu une
solution alternative (médicaments ou opération) et avoir un chien pour le plaisir et jouer.
Un chien d’assistance, pour qui, pour quoi ?
Un chien est spécialement entraîné pour aider une personne handicapée afin
d’améliorer sa qualité de vie.
- Chien-guide : handicap visuel
- Chien écouteur : handicap auditif
- Chien d’aide : handicap moteur
- Chien pour épileptique : épilepsie
- Chien social : maison de retraite ou enfants (autisme par ex)
- Respons dog / Alert dog (chiens pour épileptiques)
Un chien pour personnes épileptiques, reçoit au départ la même formation que tous les
chiens d’assistance. Il va ensuite être sélectionné et formé à intervenir pendant et après
la crise. Ce chien va effectuer un certain nombre de « commandes » qui seront dictées
par son maître. Ces actions seront ciblées en fonction du type de crise d’épilepsie et
des besoins particuliers de la personne (appuyer sur un bouton d’alerte, aller chercher
un téléphone et/ou des médicaments, rester couché sur la personne le temps de la crise,
fermer une porte pour éviter à la personne en crise déambulatoire de partir, etc).
Contraintes / responsabilités
Le lien entre le maître et le chien doit être très fort. Ils doivent être ensemble 24h/24h.
Cela implique donc une certaine responsabilité de la part de la personne épileptique.
Il est évident qu’un enfant ou une personne avec des troubles associés très marqués ne
pourront pas bénéficier d’un tel programme. La personne épileptique doit être
suffisamment autonome et responsable pour pouvoir répondre aux besoins du chien et
lui apporter tous les soins nécessaires et indispensables à sa bonne évolution.
Avantages / Bénéfices
Le chien formé va obéir à son maître car il attend une récompense à son travail fourni.
Plus la personne subira de crises d’épilepsie, plus le chien sera efficace (répétition des
commandes). Lors d’une crise, rien ne va perturber le chien. Il sera en mode « travail ».
Certains chiens sentent et alertent avant les crises. Est-ce qu’il y a une « odeur
épilepsie » ?
Rien aujourd’hui ne permet de déterminer ce don.
Les bénéfices des alertes sont très importants :
- Possibilités de planifier des activités
- Gain de confiance, moins de peurs
- Diminution ou fin des blessures
- Fréquence des crises diminuée (moins de stress grâce au chien et à l’alerte
anticipée)
Chiens d’alerte en France
Il n’y a actuellement aucune association en France qui propose des chiens pour
épileptiques. Certaines associations comme Handi’chiens sont sensibles au sujet et
souhaitent s’investir dans la cause. Soyons donc patients.
Les bénéficiaires de chiens d’alerte sont nombreux à témoigner sur les bienfaits et ce
changement positif dans leur vie. Mais il y a beaucoup de demandes, et les restrictions
imposées par les associations qui fournissent les chiens sont nombreuses = peu d’élus.